L’Afrique du Sud, le point chaud pour les requins de toutes sortes. Je l’avais déjà bien perçu précédemment lors d’une expédition plongée dédiée au « Sardin Run » sur la Wild Coast du Transkei. Notre point de départ actuel pour ces plongées autour du Cap de Bonne Espérance est False Bay. Une vaste baie en partie protégée, bordée au sud-ouest par la péninsule du Cap.

Nous sommes à moins de 40 km de la ville de Capetown située de l’autre côté du Cap. Dans les forêts de kelp, vivent de nombreux requins de variétés peu connues et primitives ; six espèces différentes rencontrées au cours d’une même plongée. Les laminaires d’Afrique du Sud sont des algues brunes géantes, de plus grande taille et moins garnies que ceux de nos côtes bretonnes. La fronde feuillue de ces forêts de kelp laisse filtrer la lumière dans l’eau verte. Ces forêts ornent les eaux côtières peu profondes et sont de véritables nurseries. Voilà un superbe terrain de jeu à venir pour débuter notre séjour.

Débarquement à l’aéroport international, transfert jusqu’à Simon’s Town. Nous voilà à pied d’œuvre, dans ce petit port de plaisance pittoresque adossé à la base de la Navy d’Afrique du Sud. Sur le petit quai d’honneur d’où nous embarquerons chaque matin, une grande statue de plongeur en bronze honore les plongeurs de cette base navale qui fut renommée lors de la Seconde Guerre mondiale. Côté requins, à une quinzaine de kilomètres vers l’extérieur de la baie, vit sur le grand îlot de Seal Island une importante colonie d’otaries à fourrure, garde-manger d’une population de grands requins blancs qui vivent là par périodes lors de l’hiver austral (saison mars à septembre).

Cette destination est moins célèbre que celle de Gansbaaï située dans un district voisin et qui est toute l’année La Mecque du requin blanc. Mais ce n’est pas l’objet de mon voyage, il est tout autre, moins spectaculaire mais plus intimiste ; au programme roussette panthère, requin chat pyjama, requin plat nez dans les eaux vertes et froides du littoral côtier et surtout les superbes requins peau bleue (saison d’octobre à juin) dans le bleu des eaux tièdes du grand large avec peut-être le timide mako. Nous verrons plus loin cette histoire de température due aux mélanges de deux océans…

Premières immersions dans le kelp

Les frondaisons des laminaires affleurent la surface selon la marée. Petits fonds de 10 à 15 mètres, parfait pour une réadaptation. Nous utilisons des blocs acier de 10 litres, vu la profondeur cela permet de rester une bonne heure. La mise à l’eau faite, d’emblée c’est une ambiance de clair-obscur pour descendre et glisser entre les grandes tiges. L’eau froide est très particulée dans False Bay, avec une faible visibilité en raison de la houle des jours précédents venue des régions australes. Ces très longues laminaires vivent fixés sur le substrat par leurs crampons, de nombreux oursins tapissent le fond. Nous espérons voir dans cette plongée un ou même plusieurs grands requins plat-nez (Notorynchus cepedianus) qui ont une envergure de 3 mètres.

D’un naturel curieux ce squale, très rare comme distribution géographique, n’a pas besoin d’être appâté pour venir vous voir. Mais la semaine dernière plusieurs orques ont traîné quelques jours dans les parages et depuis aucun spécimen de ce requin primitif aux 7 branchies n’a été revu !.… Outre sa tête arrondie, une bouche incurvée obliquement et un nez très aplati ce qui lui vaut son nom vernaculaire, il présente ainsi 7 paires de fentes branchiales bien reconnaissables (alors que la plupart des espèces de requins n’en ont que 5). Je n’aurai pas l’occasion d’observer ce requin si particulier pendant le séjour en ce lieu. Merci à Éric pour l’image fournie pour le reportage.

Endémiques de ces côtes rocheuses faites de sable grossier et de laminaires, de petites roussettes au museau court, arrondi avec des barbillons nasaux, viennent jouer entre nous, comme la roussette sombre, la panthère et la rubanée nommée requin pyjama (Poroderma africanum), cette dernière est caractéristique avec ses bandes noires longitudinales courant de la tête à la queue. De gros « Red Roman » (Chrysoblephus laticeps), poissons endémiques très populaires en Afrique du Sud et très présents dans cette péninsule du Cap, tournent à proximité, avec un poids moyen de 1 à 3 kg. Ils ont une très belle robe orangée à rouge, des dents proéminentes et appartiennent à l’ordre des perciformes et à la famille des sparidés. Intéressant pour un photographe, ces ambiances de forêts de kelp avec ces poissons orangés rappelant les eaux fraîches de Californie et le poisson Garibaldi du Pacifique.

Les acrobaties des otaries du Cap…

Pour notre successive, Morne Hardenberg choisit un îlot rocheux où se prélasse une toute petite colonie d’otaries. L’otarie à fourrure brune du Cap (Arctocephalus pusillus) est une des plus grandes en taille des espèces d’otarie, elle vit sur les littoraux rocheux et les plages de galets en Afrique du Sud et en Namibie. Ici, cette espèce est protégée depuis 1990. Sociable et grégaire, elle passe le plus clair de son temps dans l’eau, ne s’éloigne en général guère du rivage sauf pendant la période de reproduction. Certains individus font parfois de longs parcours dans l’océan. Pendant notre séjour, sur les jours d’expédition au large, nous avons retrouvé un mâle adulte à près de 100 km de la côte !