Bosnie Herzégovine : Sur les traces de Martel

le 26/10/2017 publié dans le N°275 de Subaqua
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Bruno Megessier
par Bruno Megessier

De retour de Bosnie, Bruno Mégessier, l’actuel président de la commission plongée souterraine, revient sur ses douze ans d’expéditions nationales. Il nous communique son attachement à ce pays et à ses habitants et nous fait partager son enthousiasme au travers du récit des dernières découvertes de l’équipe fédérale.

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Mon aventure balkanique « sur les traces de Martel » a commencé voici maintenant 12 ans, suite à une discussion enthousiaste au Salon de la plongée 2005 avec Claude Touloumdjian, le père fondateur de notre commission. Je me rappelle nos échanges sur fond de « chiche » ou « pas cap », le récit des explorations lancées dans un pays qui peinait à sortir de son après-guerre, des sources magiques où aucune palme européenne ni locale n’avait trempé, des interrogations sur les champs de mines laissés à l’abandon et malheureusement très persistants de nos jours.

Je me rappelle la première traversée du poste frontière de l’époque, baignée d’une ambiance « Midnight Express », en pleine nuit, sous une pluie battante, le baraquement isolé au milieu d’un champ éclairé par des projecteurs avec des gardes armés jusqu’aux dents, visages fermés. Claude nous attendait de l’autre côté, le sauf-conduit du copain ministre sous la forme d’un numéro de téléphone griffonné sur un bout de papier, pour appeler en cas de difficulté à trois heures moins le quart… Un baptême d’expédition en bonne et due forme.

Je me rappelle nos premiers hébergements à l’aventure au milieu des jardins, dans les chambres louées chez l’habitant, ou encore au milieu des champs, avec comme seul moyen de communication un petit dictionnaire de serbo-croate qui parfois se révélait peu utile lorsque notre interlocuteur ne savait pas lire ou ne comprenait pas notre accent probablement peu académique.

Je me rappelle enfin les situations multiples et parfois étranges, lorsque nous présentions nos photos dans le Paris Match local lors des contrôles de polices, à la traversée des villes où nous étions accueillis comme des curiosités, nous les touristes venus de loin profiter des eaux claires et fraîches de cette contrée oubliée au milieu des Balkans.

L’eldorado des spéléonautes

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La Bosnie Herzégovine, ce petit pays en pleine mutation, marqué par les guerres successives mais empli d’une population accueillante, est l’eldorado des explorateurs du KARST aux portes de l’Europe. Nous l’avons vu s’ouvrir et se transformer au fil de nos visites, soutenues par les fonds dédiés à la reconstruction et malheureusement en proie à la corruption caractéristique des pays abandonnés par le bloc communiste. Enfin, ce n’est pas si simple.

La Bosnie Herzégovine est constituée de deux entités territoriales : la Fédération de Bosnie-et-Herzégovine et la République serbe de Bosnie. La première est occupée majoritairement par des musulmans et des Croates catholiques. La seconde héberge les Serbes orthodoxes. Les trois populations puisent racines et affinités en Croatie, Serbie et pour les musulmans dans l’histoire de l’occupation ottomane. Les Serbes auront tendance à se référer au pays en évoquant l’Herzégovine ou la « Republika srpska », les musulmans parleront de la Bosnie ou de la « Federatsia », quant aux Croates j’avoue ne pas pouvoir être aussi catégorique. Chaque entité territoriale a son propre gouvernement. Les représentants des deux gouvernements indépendants sur le plan politique élisent le gouvernement fédéral qui a l’autorité militaire. Ajoutons les rancœurs de la dernière guerre et vous comprendrez la complexité de la politique locale.

Cela fait donc douze années que chaque été nous prenons la route, pour dix-huit heures de conduite, avec grosses remorques et coffres pleins car pour mener une expédition de plongée sur place, il faut pouvoir être totalement autonomes. Nous avons établi de solides relations dans le pays, et il existe plusieurs clubs de plongée répartis sur le territoire qui peuvent offrir un support logistique satisfaisant. Il est aussi possible d’avoir recours aux casernes des pompiers qui ont des moyens de gonflage. Cependant, les contraintes de déplacement sur le réseau routier ne sont pas à négliger et il devient plus qu’appréciable d’avoir son propre compresseur en tout lieu et à toute heure.

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Mais pourquoi aller si loin ? Il y a l’attrait des territoires vierges, la fameuse première, qui chaque année trouve sa récompense lorsque vous êtes le premier à plonger dans une source vierge. Il y a les nombreux terminus que nous avons établis et que nous repoussons au fil des visites qui se succèdent dans le pays.

Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 275 Abonnez-vous

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