Le 23 avril 1944 des avions anglais ont repéré à Saint-Malo trois torpilleurs de la classe Elbing. Il s’agit des T24, T27 et T29, appartenant à la 4e Flottille commandée par le Korvetten Kapitän Franz Kohlauf.
Le commandement allié envoie alors le 25 avril la Force 26 en embuscade au nord des Sept Îles afin d’intercepter les bâtiments allemands au cas où ces derniers seraient tentés de rejoindre le port de Brest. La Force 26 est une redoutable formation anglo-canadienne constituée du croiseur HMS Black Prince, des destroyers HMS Ashanti, HMCS Athabaskan, Huron et Haïda.
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L’affaire paraît plutôt mal engagée quand le 26 avril, vers 1 h 30, détectée par des radars ennemis, l’escadre alliée essuie le tir d’une batterie côtière allemande. Les gros obus de 203 mm qui encadrent de près la Force 26 se dirigeant cap au sud l’obligent à faire mouvement vers le nord-est.
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Peu de temps après s’être éloigné de ce dangereux voisinage les rôles s’inversent et c’est au tour des bateaux de la Force 26 de capter des échos sur leurs écrans radars. Nul doute, il s’agit des trois torpilleurs classe Elbing qui naviguaient vers l’ouest, virent à 180° et repartent vers Saint-Malo.

Le départ de la chasse est donné et à 2 h 30 l’artillerie du Black Prince se déchaîne. À une dizaine de milles de distance les salves d’obus de 5.25 pouces s’abattent en sifflant sur les T24, T27 et T29. Plusieurs impacts sont enregistrés mais d’importants problèmes techniques, auxquels s’ajoutent des torpilles lancées par les bâtiments allemands, obligent le Black Prince à rompre prématurément le combat.
Malgré cette défection forcée, la bataille continue dans l’obscurité qu’illuminent par moments les éclatements des coups au but. Des deux côtés les canons tonnent sans répit, les torpilles giclent de leurs tubes à la recherche d’une proie. L’engagement est d’une extrême violence.
À 3 h 27, atteint à plusieurs reprises par les pièces des Athabaskan et Haïda au niveau des chaudières et des machines, le T29 est la proie des flammes et stoppe. Les marins allemands résistent courageusement et, malgré le violent incendie qui embrase leur bateau, continuent de tirer.
Mais immobilisé, le T29 est à l’agonie et les deux puissants destroyers canadiens foncent à la curée, ravageant avec leur artillerie le torpilleur transformé en un gigantesque brûlot. C’est l’hallali. Un des obus qui s’abattent sans discontinuer tue le Korvetten Kapitän Kohlauf.
L’ordre d’évacuation est alors donné par un des rares officiers survivants, le Kapitänleutnant Bachmann, qui reste à bord pour saborder le bâtiment et disparaît à son tour dans l’infernal brasier.
À 4 heures, soixante-treize rescapés hurlent un dernier Sieg-Heil en hommage au T29 qui coule pavillon haut devant Perros-Guirec dans un bouillonnement d’écume et de vapeur.

Dans le carreau BF 2929 des cartes de la Kriegsmarine, seuls quelques débris encore fumant parsèment les flots et marquent la tombe du torpilleur qu’accompagnent dans la mort 137 hommes dont une grande partie de l’état-major de la 4e Flottille qui avait embarqué à son bord.
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