René Heuzey « Nous pouvons tous agir ! »

le 21/12/2015 publié dans le N°264 de Subaqua
INTERVIEW 264 - UNE
Pierre Martin-Razi
par Pierre Martin-Razi

Le projet « Un océan de vie », imaginé par le chef opérateur sous-marin et réalisateur René Heuzey, est né d’un constat simple : tous les ans, 20 milliards de tonnes de déchets sont déversées dans les océans. Lui-même a pu le constater lors de ses multiples plongées autour du monde tout comme nous pouvons également le mesurer lors de nos immersions dominicales. Ces déchets visibles et nuisibles autant pour le décor que pour les animaux qui s’y engluent ou s’en nourrissent, nous en sommes tous responsables. Pourtant, même modestement, nous pouvons tous agir pour lutter contre cette pollution marine. Propos recueillis par Pierre Martin-Razi.

INTERVIEW 264-1
Subaqua

Tu parcours la planète en quête d’images sous-marines depuis un quart de siècle. Quels constats peux-tu dresser après ces milliers de plongées ?

René Heuzey

Oui, depuis plus de 25 ans, je tourne et réalise des films pour différentes chaînes de télévisions françaises et étrangères et je parcours pour cela les mers du globe avec ma caméra sous-marine. Pendant toutes ces années, j’ai pu constater des dégradations dans bien des endroits mais aussi, je dois le dire, quelques améliorations dans d’autres. Ce qui prouve que l’on peut agir et que ces actions peuvent avoir des effets bénéfiques.

Subaqua

Du rôle de simple témoin, tu as donc choisi de passer à celui d’acteur ?

INTERVIEW 264-2René Heuzey

Plus exactement, j’ai décidé de promouvoir ce que je fais depuis longtemps déjà. À chaque fois que je plonge et que je trouve des petits déchets comme des sacs en plastique ou des bouteilles, je les remonte et je vais les jeter dans la première poubelle en vue. Il m’est même arrivé de sauver des poissons ou des petits animaux et gorgones qui s’étaient trouvés prisonniers dans des bouts de filets perdus accrochés sur les rochers. Je pense que je ne suis pas le seul mais ce comportement doit être généralisé et pour cela il faut initier une démarche, inciter les usagers de la mer à faire de même. D’ailleurs ce comportement doit être étendu aux usagers des eaux intérieures car un déchet plastique peut faire des milliers de kilomètres avant de finir dans l’océan, où il mettra des années à se décomposer en fines particules extrêmement dangereuses pour la vie marine. Ce problème des déchets plastiques a pris une ampleur internationale. On évoque souvent les amalgames formés par les cinq gyres océaniques qui représentent des surfaces de la taille d’un pays comme la Hollande et ce jusqu’à trente mètres de profondeur. Selon un récent rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), les plastiques en tout genre représentent plus de 80 % des déchets dans plusieurs mers régionales. Au-delà de la laideur, ils ont une incidence directe sur la faune. On sait que les tortues confondent les sacs en plastique avec les méduses qui sont leur alimentation principale et meurent d’occlusions intestinales. Les estomacs des mammifères et oiseaux marins sont également remplis d’objets indigestes ! Les fonds des rivières, des lacs et des mers nécessitent plus que jamais toute notre attention. Voilà pourquoi je lance aujourd’hui l’opération « Un Océan de vie ».

 Subaqua

De quoi s’agit-il plus précisément ?

René Heuzey

Partout dans le monde, nous sommes des millions de personnes à profiter des bienfaits de l’eau. Que nous soyons travailleurs, navigateurs, nageurs, plongeurs ou simples vacanciers. Si chaque personne, pendant sa promenade en mer, en rivière ou sur un lac, rencontre un déchet, le ramasse ou le remonte à la surface, combien de tonnes de détritus pourrons-nous sortir de l’eau afin qu’ils soient recyclés ? Ce geste répété deviendra un simple réflexe pratiqué lors de nos activités habituelles, sans aucune interférence sur celles-ci. Nous deviendrons des écovolontaires modestes mais actifs.

Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 264 Abonnez-vous

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