SOUDAN : l’autre côté de la mer rouge  

le 19/09/2016 publié dans le 268 de Subaqua
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Pierre Martin-Razi
par Pierre Martin-Razi

Des récifs d’une richesse flamboyante, quelques îles encore désertes et puis la fascinante présence des bancs de requins-marteaux : le Soudan à de quoi séduire les plongeurs les plus exigeants. Autrefois peu fréquentée, la destination accueille aujourd’hui (au printemps) plusieurs bateaux de croisière sans pour autant sombrer dans la surfréquentation. Le plus souvent, on y est seul… Parmi ces bateaux, l’Odyssey, sur lequel Pierre Martin-Razi a effectué un circuit de deux semaines dans le Sud, jusqu’à frôler la frontière de l’Érythrée. Photos de l’auteur.

Jusqu’à ces dernières années, et malgré le coup de projecteur donné par Cousteau avec «Le Monde sans soleil», les plongeurs en mer Rouge soudanaise constituaient une denrée plutôt rare. Les centres de plongée à terre étaient inexistants (sauf erreur de notre part, ils le sont toujours) et les bateaux de croisières se comptaient sur les doigts d’une seule main. Encore avait-on pour cela le droit à un ou deux doigts amputés… Sans doute peut-on expliquer cette offre maigrichonne d’alors par la nécessité de rejoindre Port-Soudan avec l’ineffable compagnie aérienne indigène. Si, en ce qui nous concerne, celle-ci a toujours eu le mérite de partir et d’arriver à l’heure reconnaissons-lui tout de même un caractère – comment dire ? – plutôt exotique… Au point que les tour-opérateurs éprouvaient quelque répugnance à mettre en avant la destination et que celle-ci est restée un peu à l’écart pendant des décennies. Faut-il s’en plaindre ?

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Aujourd’hui, les choses ont (un peu) changé et l’on ne s’en plaindra pas davantage ! On peut désormais depuis la France, gagner Port-Soudan par deux autres voies : la première consiste à se rendre au Caire, avec Egyptair par exemple, puis sauter dans un avion de Nile Air qui effectue le dernier tronçon une bonne partie de l’année. L’autre chemin, celui que nous avons emprunté, fait passer par Dubaï avec Emirates puis rejoindre Port-Soudan à bord d’un avion de Fly Dubaï, rejeton à bas coût de la compagnie nationale dubaïote. Au retour, cette solution impose un crochet par Khartoum, ce qui a pour conséquence de rallonger le vol de trois heures puis de finir sa nuit dans les dutyfree shops de l’aéroport scintillant. Ce n’est ni le chemin le plus court ni le plus rapide pourtant ce temps mis entre parenthèses est, comme on va le voir, bien anodin au regard des rencontres sous-marines faites la semaine ou la quinzaine précédente !

La question qui fâche

Maintenant que nous pouvons donc nous rendre au Soudan sans autre transpiration que celle causée par la chaleur demeure la sempiternelle question, voilée d’inquiétude, de la sécurité sur place. Question que les amis bien intentionnés ne manquent pas de vous poser quand ils apprennent que vous partez pour le pays des exploits du capitaine Marchand. Soit. Fachoda est loin et j’ai, pour ma part, le raisonnement suivant : si des hommes d’affaires acceptent de déplacer des bateaux avoisinant le million d’euros dans un coin du monde pour les y faire travailler, c’est, on peut le supposer, qu’ils le font après s’être un peu renseignés. De plus, la mer Rouge n’est ni le Darfour ni le Béjaland et l’on risque tout autant, me semble-t-il, dans une salle de rédaction, de spectacle, une terrasse de café ou lors d’un feu d’artifice. Ni plus ni moins. Ce raisonnement vaut d’ailleurs pour l’Égypte, un peu plus au nord, qu’une poignée de dévots manipulateurs, habités de pensées moyenâgeuses, tente de mettre à genoux comme elle voudrait le faire du reste du monde.

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En tout cas, je peux bien le confesser : de ce dernier séjour au Soudan, je n’ai vu que le bleu de la mer et ses dessous (beaucoup), des îles peuplées d’oiseaux (beaucoup également), deux ou trois épaves rouillées qui démontrent la rudesse d’une mer assez mal pavée, quelques pêcheurs, des gardiens de phare souriants et des marchands de légumes écrasés de soleil… Les seuls fous que j’aie jamais rencontrés avaient le bec bleu…

Luxe, confort et… plongées

 

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Nous vous avons déjà présenté l’Odyssey à l’occasion d’une croisière effectuée voici deux ans en Égypte : quarante mètres de confort, des cabines claires et bien insonorisées pour accueillir 26 plongeurs maximum, des hublots étanches, de l’eau et de l’énergie à volonté (ce n’est pas pour autant qu’il faut gaspiller !), une climatisation qui fonctionne, le tout agrémenté d’un service aux petits oignons avec jacuzzi, serviettes et sorties-de-bain, cuisines généreuse et cocktails vespéraux. Propulsé par deux moteurs de 1 100 ch chacun, l’Odyssey affiche une vitesse de croisière qui lui permet d’aller où d’autres bateaux ne vont pas et, à tout le moins, beaucoup plus rapidement avec un passage à la mer facilité. Passage d’autant plus doux que le bateau est parfaitement mené par Saad, son commandant.

croisiere-268-5L’agence Seafari fondée par Jean Hénon et Sylvie Jacob voici un quart de siècle, en est l’armateur. Elle s’appuie depuis 2003 sur Bruno Brechler pour développer ses croisières et conséquemment ses bateaux. L’Odyssey est le petit dernier (petit étant une façon d’écrire !), il a été pensé et demeure maintenu comme s’il s’agissait d’un bateau personnel. On ne peut pas mieux dire……………

La grande affaire soudanaise

Certes, le Soudan peut être l’endroit de rencontres avec toute la faune de la mer Rouge dont les barracudas, les thons, les tortues, les mantas, les dauphins et quelques requins comme les longimanes ou les soyeux, sans parler des requins de récifs… Pourtant, ce qui motive la plupart des plongeurs à venir ici sont les bancs de marteaux. La grande affaire soudanaise.

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On les observe plutôt le matin ou lors de la deuxième plongée, non qu’ils s’absentent dans l’après-midi mais comme ils tournent généralement au-delà de 35 m, on préfère partir à leur rencontre le matin. Voilà comment ça se passe.

Le briefing est toujours un peu le même, la typologie de ces plongées assez constante : un récif, émergeant ou pas, plutôt étiré, souvent orienté nord-sud, dont on choisit de visiter une des extrémités. Le bateau est mouillé sur la face sous le vent. Un plateau vers 15, 20 ou 25 m, en forme de pointe, prolonge le récif avant de descendre vers les abysses. Généralement le banc de marteaux tourne à quelques mètres de la paroi entre 30 et… trop profond.

Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 268 Abonnez-vous

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