Au printemps dernier, Burgess et ses collaborateurs, un groupe renommé de scientifiques américains, ont publié un article sous le titre suivant « Range contraction allows harvesting to extinction » (« La réduction de l’aire de répartition permet la récolte jusqu’à l’extinction », avril 2017), dans la prestigieuse revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS, « Comptes rendus de l’Académie des sciences américaine »). Cet article fournit une perspective très utile sur les conséquences des diminutions de l’aire de répartition des espèces, diminutions qui permettent de conserver localement des densités conséquentes de populations en déclin. Burgess et ses collègues suggèrent que cette contraction des populations a pour conséquence de maintenir des rendements de pêche ou de chasse au niveau local – et donc une rentabilité économique – ce qui conduit les populations naturelles d’espèces marines et terrestres appauvries à être chassées, ou pêchées, jusqu’à leur effondrement puis leur extinction. L’approche proposée par Burgess et ses collaborateurs, qui combine modélisation et observations empiriques, couvre un large spectre d’espèces (éléphant, esturgeon, thon rouge), avec des résultats tout à fait convaincants.
Des exemples évidents de ce processus existent chez les ressources marines exploitées, notamment chez les poissons pélagiques (poissons de pleine eau ; petits poissons bleus (sardines, anchois, harengs ou maquereaux), thonidés et poissons à rostre notamment. La compétence des pêcheurs pour trouver des bancs, ou des agrégations en période de reproduction, dans des zones résiduelles de confinement peut conduire à maintenir des captures importantes alors que les populations sont en fort déclin, provoquant leur effondrement rapide.
Cependant, bien que le lien direct entre la surexploitation et le risque élevé d’extinction soit bien documenté et vérifié pour les populations, voire les espèces terrestres, force est de constater que l’Homme a causé peu d’extinctions complètes de populations de mollusques, crustacés et poissons en mer. Olivier Le Pape a donc rédigé avec des collègues, scientifiques spécialisés en écologie marine, une réponse à cet article qui tempère les conclusions radicales et catastrophistes de Burgess et ses collègues, en ce qui concerne les espèces marines. Cette réponse est parue dans la même revue que citée précédemment (PNAS) en août 2017 sous le titre « Overfishing causes frequent fish population collapses but rare extinctions » (« La surpêche entraîne l’effondrement fréquent des populations de poissons, mais rarement leur extinction »). La surpêche a effectivement déjà entraîné des effondrements de population, dont les niveaux ont alors durablement chuté de plusieurs ordres de grandeur. Il ne s’agit d’ailleurs pas de la seule pression subie par les ressources marines, qui endurent aussi les conséquences de la dégradation de leurs habitats du fait d’autres activités humaines. On observe que les populations de poissons et d’autres ressources vivantes marines peuvent demeurer à des niveaux très faibles en termes de quantité.
Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 275 Abonnez-vous
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