Trois facettes égyptiennes

le 02/05/2013 publié dans le N°248 de Subaqua
N248_Special-Egypte
Pierre Martin-Razi
par Pierre Martin-Razi

Pendant des décennies et malgré quelques aléas, l’Égypte a longtemps caracolé en tête des destinations pour les plongeurs français. Ils s’y rendaient chaque année par milliers. Il faut dire que l’endroit a de quoi séduire les plus difficiles : possibilité de séjours balnéaires, croisières sur des bateaux au luxe grandissant, une eau toujours claire, presque toujours chaude, des épaves mythiques, du corail magnifique et des poissons qui ne le sont pas moins. Sans compter les rencontres de plus en plus fréquentes avec les dauphins et le tout à cinq heures de vol de Paris sans décalage horaire ou presque. Pourquoi se priver ? Pourtant, depuis les soubresauts de la révolution arabe, l’Égypte n’a plus la côte. Nous pouvons pourtant affirmer que la côte de la mer Rouge est d’une tranquillité incroyable et qu’il ne nous a pas semblé y avoir plus d’agitation que naguère et que les touristes y sont toujours reçus avec le même sourire. Cette injustice d’appréciation nous a conduits à vous présenter trois possibilités de découvrir ou de redécouvrir l’Égypte parfaitement adaptées à ce que l’on cherche à y trouver. Un dossier de Pierre Martin-Razi et Yvan Chocoloff. Photos sous-marines, Pierre Martin-Razi.

Chargement de la carte...

#1 : Soma Bay, la mer Rouge en décalage

À 45 km au sud d’Hurghada et une quinzaine de kilomètres de Safaga, Soma Bay abrite cinq hôtels haut de gamme parmi lesquels se niche un centre de plongée Orca, particulièrement bien équipé où l’on peut découvrir toutes les facettes de l’activité. De la formation en piscine à la découverte des tout derniers recycleurs… Une autre manière d’aborder la plongée. Par Pierre Martin-Razi. Photos de l’auteur.

N248_Special-Egypte_1-1

Phoebe Cyr, la chargée de marketing de Soma Bay, ramène d’un geste vif ses cheveux auburn en arrière, avale une gorgée d’eau minérale, pianote sur son BlackBerry puis précise dans un sourire à damner tous les béatifiés de la création : ”You know Pierre, in Soma Bay, we are in the middle of nowhere… People like that”… Un temps. Mon verre de bière se couvre d’une couche de buée opalescente, des dizaines de bulles d’alacrité animent joyeusement le liquide ambré. Je peaufine ma réponse…

Le milieu de rien, Phoebe, vous plaisantez ? Moi, je ne trouve pas. Enfin, je ne voyais pas la chose ainsi… Pas vraiment. Le désert, ce n’est pas rien. J’en aime l’aride beauté et la possibilité d’infinie solitude. Lourde, palpable, riche. Pour tout dire : apaisante. Le désert arabique, c’est une mer minérale avec ses vagues de terre et de poussière, vous ne trouvez pas ?

  • À côté de ça, loin des envolées lyriques, je ressens aussi une douloureuse impression d’irrémédiable gâchis pour cette région que j’ai aimée d’amour dès mon premier séjour, en février 1980. 

  • L’évolution du littoral égyptien autour d’Hurghada est un vaste non-sens, un développement de pacotille absurde, sans début ni fin, sans milieu ni frontière.

Sans âme. Une sorte de farce née dans les années quatre-vingt, dont les hôtels de médiocre qualité seraient les cellules multipliées à l’infini d’une tumeur bâtie par des investisseurs inconséquents et pour des touristes aveugles…

En vérité, Phoebe, vous avez peut-être raison, s’éloigner du bourbier comme vous le faites ici, à Soma Bay, ce n’est pas si mal… Alors, Soma Bay comme milieu de rien ? Centre de nulle part ? Ma foi, en y réfléchissant, pourquoi pas ?

Retour au Kite

Devant nous, au-delà de 7BFT Kite House, de son lounge-bar et de sa terrasse accueillante, les kitesurfeurs enchaînent bord sur bord dans la fraîche brise de mars… Au dire des spécialistes, l’endroit est considéré comme l’un des trois premiers sites de kite au monde…

Mon expérience en la matière se limitant à des bordées… de jurons, et de (très) longues apnées tracté par un cerf-volant indomptable, ce n’est pas à moi de contredire l’assertion. De temps à autre, un type revient sur la plage, les yeux brillants de bonheur et semble confirmer la chose…

Sur la plage, des filles prennent le soleil à l’abri des cannisses, des enfants jouent. Un labrador vient poser sa tête sur ma cuisse avant de filer vers nulle part, sans doute à la poursuite de quelque rêve canin… Des mouettes s’envolent devant la boule de poils… Comment l’écrire ? Ici, on se sent bien.

À deux ou trois encablures de là, le récif s’étend nord-sud, de la surface à plus de cent mètres de profondeur. Les plongeurs y sont d’avantage chez eux…

N248_Special-Egypte_1-5

Je repose mon verre de Stella à l’amertume revigorante alors que Phoebe continue sa présentation entre deux bouchées de club sandwich. Ses boucles d’oreilles, deux plumes d’argent, scintillent sous le soleil.

Nous disposons de cinq hôtels haut de gamme avec toutes les facilités possibles. On peut passer comme on veut d’un restaurant à l’autre, d’une activité à l’autre, du spa au golf, de la planche à voile à la plongée, du fitness au kite. Nos clients (il y a dans le mot anglais guest une nuance d’invitation tristement absente chez nous…) ont le sentiment d’une totale liberté tout en étant isolés du monde. Protégés…

Est-ce si nécessaire ? Je regarde autour de moi. Depuis le printemps arabe, l’Égypte a mauvaise presse. Le tourisme y est en chute libre. Des vols charters sont supprimés, des hôtels, des centres de plongée ferment, les bateaux restent à quai. Très sincèrement, cela n’est justifié par rien d’autre qu’une fausse idée. L’amabilité égyptienne est inchangée et l’on ne prend pas plus de risque à venir ici qu’à vivre chez nous. Cette désaffection injustifiée n’a qu’un seul mérite : elle permet aux poissons d’être un peu tranquilles !

À droite, dans le lointain, les contours de Safaga se dessinent à travers la brume de chaleur. Devant nous, les moutons ivoire animent le bleu de la mer. Une paire de kilomètres au nord, les hôtels de Soma Bay se dressent blancs et ocre. Quelques palmiers frémissent sous le vent.

N248_Special-Egypte_1-3

Plus loin encore, sur l’horizon, une bande verte incongrue marque le début du golf de l’hôtel Cascades. Et je ne peux m’empêcher de penser que les hommes constituent une espèce incroyable… Un golf dans le désert…

Soma Bay est une création comme seule l’Égypte semble capable d’en abriter : une sorte de Brasilia chez Cléopâtre, de Vegas chez Ramsès avec la palme d’or toutes catégories confondues pour le Sheraton, mélange des temples de Karnak et d’Hashepsout à Louksor mais qui aurait été redessiné par Uderzo.

N248_Special-Egypte_1-4

Il y règne pourtant une discrète sérénité très certainement associée à l’éloignement, à la qualité et au niveau de prestations de l’endroit. Finalement, je le confesse, c’est assez réussi ! ……….

 


#2 : Alysés plongée, un coin de France à Hurghada

L’écriture des prochains hors-séries Subaqua consacrés au N1 et au N 2 et dont la sortie est prévue à l’automne, a nécessité des photographies d’illustrations spécifiques. Certaines d’entre elles ont été prises le long de nos côtes métropolitaines ou en Corse, d’autres l’ont été en fosse. Mais c’est en Égypte — parce qu’à l’automne l’eau y est claire, calme et chaude ! — que nous avons complété l’iconographie. Nous avons pour cela été accueillis en septembre dernier par la Scia Alysés plongée d’Hurghada, un vrai coin de France en Égypte ! Par Pierre Martin-Razi. Photos de l’auteur.

N248_Special-Egypte_2-1

Ne tournons pas autour du pot : nous avons un faible pour les Surina, les responsables de la structure commerciale internationale agréée Alysés plongée d’Hurghada. Ils ont le sens de l’accueil véritable, c’est-à-dire sans chichis comme savent le faire les gens sincères et gentils.

Leurs clients deviennent souvent des amis, Alain et son fils Steven ont du sel dans les veines, enfin Sylvie gère tout ce petit monde avec la distance amusée de quelqu’un qui a connu bien pire. Sans doute son ancien métier d’infirmière spécialisée n’y est-il pas étranger…

Et puis, Alain associe à son goût de la plongée, celui tout aussi prenant de la musique et de la guitare, une passion qu’il a transmise à Tristan, son second fils… Je signale en passant qu’on les retrouve tous deux avec l’orchestre Resurrection au Papa’s Bar de la nouvelle marina les jeudis soirs où l’on croise également le tout Hurghada quand il n’est pas en croisière… J’ai des noms ! Les bières se vendent au mètre et les standards de rock défilent jusqu’au mitan de la nuit. Forcément, on évite de plonger le lendemain matin !

 

Les couleurs de la fédération

Alysés plongée est aujourd’hui installé dans l’hôtel AquaFun sur Sheraton street, en plein centre d’Hurghada, juste devant l’embarcadère où s’amarre le bateau pour les sorties à la journée.

Conscients jusqu’à ces dernières années de la surfréquentation des sites de la région (ce n’est plus vraiment le cas depuis deux ans maintenant), Alain et son équipe s’appliquent à organiser leurs plongées en décalé, autant par les sites choisis que par les départs tôt dans la matinée.

Ce qui fait que l’on peut se retrouver sur les spots d’Hurghada presque comme au temps naguère, c’est-à-dire sans trop de bateaux au mouillage et de plongeurs dans l’eau ! Bien vu…

Au-delà du plaisir intact qu’Alain prend dans chacune de ses plongées malgré les milliers qu’il affiche au compteur, le plus déroutant chez lui demeure son goût de l’enseignement après des années et des années de pratique quotidienne.

Il semble que l’érosion n’ait pas de prise sur ce moniteur (il est BEES 2) formé à l’école des clubs associatifs de la fédération. Alors que d’autres peuvent à raison se lasser d’enseigner les vidages de masque ou les lâchers d’embout, lui non.

N248_Special-Egypte_2-3

Il y met toujours la même passion, la même attention, la même réflexion et, osons l’écrire, la même générosité qu’y mettent les moniteurs bénévoles même si la formation est depuis longtemps devenue son métier.

C’est sans doute pour cette forme d’engagement et de générosité qu’Alain Surina prône depuis toujours et avec les mêmes convictions, les valeurs de l’École française de plongée même s’il affiche, région et internationalité obligent, d’autres cordes à l’arc d’Alysés plongée. ………..

 


#3 : Océanos, génération plaisir

La flotte des bateaux de croisière en mer Rouge se renouvelle peu à peu. Depuis l’automne 2012, un nouveau venu est à prendre en compte, il s’agit de l’Océanos avec son capitaine Ayman Gadala, qui est déjà bien connu de ce monde-là. L’Océanos est un véritable hôtel flottant, dont il a tous les avantages sans les inconvénients. Yvan Chocoloff nous le fait découvrir.

N248_Special-Egypte_3-1

L’ Océanos est un navire flambant neuf qui a été pensé jusqu’aux moindres détails. D’une longueur de 39 m et 9,20 m de large, il fait partie du fleuron des croisières haut de gamme de la mer Rouge.

Il peut accueillir 28 passagers en cabines doubles. Celles-ci sont très bien équipées, lit spacieux avec un très bon matelas, douches et toilettes séparées, climatisation, on y trouve même un petit frigo.

La salle de restauration de 54 m2 est agencée avec quatre tables rondes, le service se fait au buffet mais reste néanmoins de très haute qualité, il y a même un bar permanent.

Sur le premier pont supérieur se trouve un grand bar avec des fauteuils et canapés où il fait bon de se prélasser après la plongée.

N248_Special-Egypte_3-3

On y trouve aussi une bibliothèque salle vidéo avec un grand écran, lieu idéal pour visionner les photos ou faire les briefings. Au même niveau, et à l’avant du bateau, un espace solarium équipé de matelas est prêt à accueillir les adeptes du bronzage.

Sur le pont supérieur, c’est le coin farniente avec un espace ombragé, canapés et fauteuils sont installés pour rendre le lieu encore plus convivial.

Si pour le côté confort il est difficile de trouver mieux, il en est de même pour la zone de plongée de 50 m2. Chaque place est nominative avec son propre matériel, l’espace permet une circulation aisée. Des petites niches ont été prévues pour recharger ses phares ou y mettre les ordinateurs de plongée.

Le bateau est équipé de 2 compresseurs air et d’une station de gonflage nitrox, ce qui n’est pas un luxe surtout lorsqu’on fait 3 plongées par jour.

N248_Special-Egypte_3-2

Sur la plateforme plongée, on trouve également deux douchettes, pas de problème de restriction, 18 000 l d’eau sont disponibles et les cuves sont rechargées avec deux dessalinisateurs.

Comme dans toutes les prestations de ce niveau, le personnel est très attentif, que ce soit pour s’équiper ou au retour de plongée, il apporte les peignoirs et offre une petite collation. De plus, certains membres de l’équipage parlent un petit peu français et le comprennent relativement bien, ce qui est très agréable.

L’encadrement plongée est soucieux de faire découvrir les richesses des fonds marins et prend attentivement en compte les besoins ou les capacités de chacun.

La vie à bord est plus que confortable, même la restauration est de très bon niveau, un vrai cuisinier concocte les plats frais et les pâtisseries ou viennoiseries auxquels il est difficile de résister.

Bien sûr des soirées à thème sont organisées avec des jolies surprises, mais là tout dépend des événements de la croisière. Voilà donc un nouveau venu dans le monde de la plongée en mer Rouge et qui ne manquera pas de faire parler de lui…

Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 248 Abonnez-vous

Commentaires

Aucune commentaire actuellement

Écrire un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *