Les déchets plastiques en mer : la partie émergée de l’iceberg

Stéphan Jacquet et Jean-François Ghiglione
Publié le 22 déc. 2016, modifié le 18 sept. 2024
Jean-François Ghiglione est directeur de recherche au CNRS affecté au Laboratoire d’océanographie microbienne et aussi directeur adjoint de l’Observatoire océanologique de Banyuls. Spécialiste, entre autres choses, de la pollution plastique au sein des océans, il fait un point détaillé sur le sujet pour Subaqua.

Au port, occupé par les dernières vérifications de matériel et la prise de contact avec la palanquée, le plongeur ne se préoccupe pas trop des morceaux de plastiques qui flottent à la surface autour du bateau. Sous l’eau, on s’est habitué à voir des déchets (sacs plastiques, lignes et filets de pêche…) mais notre œil tente d’ignorer ces « parasites » pour se focaliser sur les merveilles de la nature. Sur la plage, les enfants rencontrent de nombreux bâtons de sucettes, bouchons… quand ils apprennent à connaître la variété des formes des coquillages.

Pourquoi le problème de la pollution par les plastiques est-il si important en mer ?

Notre société de consommation est de plus en plus gourmande de produits à base de plastiques. Depuis leur apparition sur le marché il y a une soixantaine d’années, ils ont envahi notre quotidien. La raison de leur succès est leur coût extrêmement bas et la grande variété des produits qui en émanent par rapport au bois, au verre, au papier ou au métal. Aujourd’hui, les plastiques sont fabriqués essentiellement à base de polymères issus de l’industrie pétrochimique, qui utilise les ressources fossiles limitées de notre planète et qui est une des causes majeures de la pollution de notre atmosphère et des dérèglements climatiques que nous observons. En faisant entrer notre planète dans l’aire de l’Anthropocène, l’homme a également inventé des déchets dont la durée de vie est supérieure à la sienne.

La mer est le réceptacle final de tous les déchets qui viennent de la terre. En laissant négligemment s’envoler un emballage plastique qui emballait lui-même l’emballage d’une friandise, le montagnard n’a pas conscience qu’il lègue ce déchet à ses enfants et petits-enfants qui batifoleront dans la mer. On estime la durée de vie des plastiques entre 100 et 1 000 ans, selon leur composition. Charriées par les vents et descendant les rivières, des tonnes de plastiques se concentrent dans les fleuves et se déversent en mer chaque année. Entre 1 et 10 % des 300 000 tonnes de plastique produites par an ne seront pas collectées et finiront dans les océans. Qui est responsable ? Cette fois, on ne peut pas tout reprocher aux industries qui sont souvent montrées du doigt par leurs choix économiques souvent loin des préoccupations écologiques. La décharge directe par les ménages (vous, nous, moi !) arrive en tête, devant les installations touristiques, les rejets par les décharges et par les fleuves. Les rejets directs en mer par les plaisanciers et les bateaux représentent 13 %. La pollution vient donc massivement du continent.

Illustration d'un ordinateur de plongée
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Illustration d'un mérou brunIllustration d'un rocher