Les Cubains ne peuvent toujours pas sortir librement de leur île mais les touristes, eux, viennent découvrir ses merveilles depuis plus de 50 ans à l’exception des Américains du fait de l’embargo décrété par les USA depuis 1962. Pourtant, depuis les accords passés sous le régime Obama fin 2014, les enfants de l’oncle Sam sont les bienvenus. Sauf rebondissement de dernière minute orchestré par le président Trump, ces relations devraient perdurer.
C’est ainsi qu’à Cuba se côtoient, sans état d’âme, des anachronismes typiques comme des bus climatisés destinés aux touristes avec des automobiles d’un autre âge dont le moteur, même à l’agonie, continue de tourner. Pour les passionnés de voitures de collection, c’est ici le paradis des véhicules américains des années cinquante : DeSoto, Studebaker, Ford, Plymouth ou Chevrolet.
Bien loin de l’effervescence, très loin de ses habitants et maintenant de ses touristes, il existe un endroit merveilleux, commençant, néanmoins, à s’ouvrir très progressivement au reste du monde. Pendant des dizaines d’années, à 60 milles au large du port de Jucaro situé sur la côte ouest de l’île, Fidel Castro avait son paradis sous-marin qu’il s’était réservé pour ses parties de pêche et de chasse sous-marine. Cet archipel d’îlots d’origine corallienne non habités a été baptisé Jardines de la Reina, les Jardins de La Reine. Bien trop loin des côtes pour être accessible par les radeaux de fortune utilisés par les pêcheurs, cet archipel a été très longtemps uniquement fréquenté par Fidel Castro, sa famille et ses proches. A priori, ce serait suite à une rencontre avec Jacques Yves Cousteau que Fidel Castro aurait décidé de protéger cet écosystème unique bénéficiant d’une biodiversité sans pareille dans les Caraïbes.
C’est ainsi que les Jardins de la Reine devinrent en 1998 zone marine protégée pour ensuite être transformés en parc national depuis 2010. Encore aujourd’hui, aucun pêcheur ne peut accéder à ces îles et les patrouilles journalières des rangers ainsi que les amendes encourues (privation des bateaux et de tout le matériel de pêche à vie) font que ces îles ne sont visitées que par quelques amoureux de la mer.
Le Dr Julio Baisre, responsable du pôle de protection marine de l’université de La Havane m’explique que les îles du Jardin de la Reine disposent de 3 écosystèmes interdépendants :
> Le grand large où les larves (zooplancton) se développent.
> La mangrove, permettant ensuite aux larves de se développer tout en se protégeant des prédateurs.
> Le récif corallien permettant ensuite aux poissons devenus adultes de se nourrir.
Ainsi, grâce aux rythmes des marées, ces équilibres perdurent et confèrent aux îles une biodiversité marine unique.
Amusant de voir le pied de nez que fait la Nature à la stupidité humaine. En effet, comme le souligne le New York Times dans un article paru le 14 juillet 2015, les USA et Cuba bénéficient de deux écosystèmes distants de 90 milles donc dépendants ! La production de l’un sert à l’autre et inversement. Le Dr Julio Baisre, rajoute avec ironie que « les larves n’ont pas besoin de visa pour circuler entre les deux pays ! ».
La communication sur les plongées dans ces îles de la Reine n’existe que depuis deux ans. Autant dire que la publicité sur cette destination en est à ses débuts. Avant c’était le bouche-à-oreille qui fonctionnait. Quelques plongeurs italiens et allemands au départ puis l’information a été lancée et relayée. Quelles sont ces îles où l’on croise des requins à chaque plongée sans avoir à appâter ? Quelles sont ces îles où l’on peut plonger à côté de crocodiles ? Quelles sont ces îles riches d’une vie marine exubérante ?
Embarqué sur le Jardines II d’Aggressor, le plus beau et le plus confortable des 5 ou 6 bateaux proposant une croisière sur ces îles, me voilà enfin sous l’eau pour répondre à toutes ces questions.
Sur Occitas, dès la première plongée dite de réadaptation, cela saute vraiment aux yeux. Le récif est intact : aucune dégradation par les ancres, les amarrages sur les bouées posées par le parc sont obligatoires. J’avais souvent eu comme souvenir de mes différentes plongées dans les Caraïbes, cette image d’un récif moins coloré que celui de la mer Rouge et moins poissonneux. Ici, les couleurs restent celles des plongées aux Caraïbes mais le récif est peuplé de toutes parts.