Jeter l’ancre dans la posidonie protégée est un délit !

Logo Subaqua
La rédaction
Publié le 27 nov. 2024, modifié le 5 déc. 2024
Saignée dans la posidonie par l'action d'une ancre
Les ancres des gros navires causent de véritables saignées dans l'herbier de posidonie. © Laurent Ballesta/Andromède Océanologie
Le tribunal maritime de Marseille a condamné, le 22 novembre 2024, deux capitaines ayant mouillé leurs navires dans des zones interdites (fonds de posidonie) à rembourser les dégâts causés à l'herbier par leurs ancres. Cette décision fait du préjudice écologique porté à la posidonie un délit reconnu et retenu par les juges. D’après un communiqué de bureau du préfet maritime de la Méditerranée.
Plante et pas algue, la posidonie joue un rôle écologique majeur en Méditerranée. Ici une fragile fleur de posidonie. © Laurent Ballesta/Andromède Océanologie

Ce que dit la réglementation

Face au besoin de protection des herbiers de posidonie et aux enjeux de sécurité maritime, le préfet maritime a décidé, en avril 2019, de renforcer l’encadrement du mouillage et de l’arrêt des navires. Depuis cette date, un ensemble d’arrêtés préfectoraux ont été élaborés après concertation avec l’ensemble des acteurs du monde maritime pour réglementer les mouillages.

Une ancre entre deux taches de posidonie
Dans les zones non protégées (non réglementées), opter pour un mouillage intelligent (ici entre deux taches d'herbier) si la clarté de l'eau le permet. Attention à la chaine toutefois... © Subaqua

Rappel des faits

Entre juin 2021 et septembre 2023, le yacht Take Off (26 mètres) a jeté son ancre à trois reprises dans des zones interdites à Cannes et Saint-Tropez. Lors de l’audience pénale, son capitaine a été condamné à 20 000 € d’amende et une interdiction de navigation d’un an dans les eaux territoriales françaises.

En juin 2023, c’est le My Falcon (51 mètres) qui a mouillé dans une zone interdite à Cannes. Lors de l’audience pénale, le capitaine du navire a été condamné à 15 000 € d’amende.


Une bouée réservée aux grosses embarcations
Pour les grosses embarcations, des bouées d'amarrage spécifiques existent © Alexandra Alias/Andromède Océanologie

Compensation du préjudice écologique subi

S’étant constituées parties civiles, deux associations, France Nature Environnement et la Ligue de Protection des Oiseaux, ont demandé au tribunal maritime de Marseille de se prononcer sur le préjudice écologique porté à l’herbier de posidonie par l'ancrage (répété pour Take Off ) de ces deux yachts.

Vendredi 22 novembre 2024, le tribunal a retenu l'existence d'un tel préjudice sur le plan civil et a condamné les capitaines à verser des indemnités de 86 537 € (Take Off) et 22 423 € (My Falcon) en compensation de la perte de valeur écosystémique.

Ces sommes seront versées à l’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse pour mener des opérations de restauration écologique des herbiers de posidonie.



Un plongeur repique à la main de la posidonie
Grâce aux sommes allouées par le tribunal, des opérations de restauration (repiquage à la main de brins de posidonie) vont permettre de réparer, en partie, le préjudice causé par ces ancrages illégaux. @ Laurent Ballesta/Andromède Océanologie.

Une décision qui va faire jurisprudence

Pour la première fois, les juges reconnaissent un préjudice écologique d’atteinte à l’herbier de posidonie. Par la même occasion, la cour reconnaît que les associations sont fondées à agir en réparation du préjudice écologique.

Point important : la Cour a également retenu la présomption de dommages sur l’herbier de posidonie dès lors qu’un navire mouille en zone protégée par arrêté préfectoral. En l’absence de preuve contraire, le mouillage dans une zone protégée est présumé causer des dommages aux herbiers.

Ce principe repose sur l’impact environnemental reconnu du mouillage dans ces zones sensibles et sur l’importance des herbiers de posidonie pour les écosystèmes marins.

Pour tout savoir sur leur importance, télécharger ici (PDF) l'édition spéciale du cahier de surveillance de la plateforme Medrix intitulée "Posidonie : la foret endémique de Méditerranée".


Un bateau amarré à une bouée blanche
Sur un certain nombre de sites de plongée, des bouées d'amarrage prioritaires évitent d'avoir à jeter l'ancre. © Subaqua

Des applications pour respecter l’herbier

Cette décision de justice inédite devrait vraisemblablement contribuer à l’efficacité de la politique de protection des herbiers de posidonie portée depuis plusieurs années par les services de l’État, les collectivités engagées et les acteurs privés associés.

Que l'on possède une embarcation longue de dizaines de mètres ou un modeste semi-rigide, les zones interdites au mouillage sont, évidemment, à respecter.

Et puisque nul n’est censé ignorer la loi, rappelons ici l’existence de l'application Donia, dont nous avons déjà souligné la pertinence en Méditerranée dans un précédent article publié sur Subaqua.fr, ainsi que pour de l'appli Mes Calanques dédiée au parc national des Calanques (Marseille).


Tablette affinchant carte mouillage de Donia.
L'application DONIA offre notamment un rendu cartographique enrichi en intégrant la nature des fonds, la bathymétrie et la réglementation en mer. © DONIA
Illustration d'un ordinateur de plongée
Ne ratez aucune info
Inscrivez-vous à notre newsletter mensuelle pour ne rien rater de votre magazine
Illustration d'un mérou brunIllustration d'un rocher