Exploration des abysses : seconde vie pour le Nautile

Portrait Olivier Clot-Faybesse
Olivier Clot-Faybesse
Publié le 27 sept. 2024
Le Nautile à moitié submergé avec un plongeur
Contrôle du nautile par plongeur pendant une mission © Olivier Dugornay, Ifremer
Depuis 40 ans, le sous-marin habité Nautile, fleuron de la flotte océanographique française et opérée par l’Ifremer, a effectué plus de 2 000 plongées. Alors que sa mission devait s’achever en 2025, décision a été prise de prolonger l’activité du seul engin sous-marin scientifique habité de l’Union européenne capable d’atteindre les grands fonds. D’après un communiqué de l’Ifremer. Image d’ouverture : contrôle du Nautile par plongeur pendant une mission © Olivier Dugornay, Ifremer
Deux personnes sur le toit du Nautile
Un pilote et un plongeur sur le Nautile. Ce dernier sécurise la descente et le détachement du Nautile et restera jusqu’à l’immersion. © Cyril Fresillon / MIO / Ifremer / CNRS Images

Fenêtre sur les profondeurs

Depuis le XIXe siècle, le monde mystérieux des abysses a été approché pas à pas. Qu’il s’agisse de la mise en évidence de la tectonique des plaques, des avalanches sous-marines, des aléas liés aux tremblements de terre profonds, des sources hydrothermales, véritables oasis de vie, la compréhension du fonctionnement des océans et de leurs écosystèmes est, depuis les années 1970, remarquable grâce aux progrès de la technologie.

Le submersible Nautile demeure l’un des acteurs majeurs de ces explorations. Il fait partie du cercle restreint au niveau mondial des sous-marins habités capables d’atteindre les grands fonds. Mis en service en 1984, le Nautile explore les abysses jusqu’à 6000 mètres de profondeur. Pendant six à huit heures par plongée, un scientifique et deux pilotes observent les fonds marins et mènent des expérimentations depuis la sphère du sous-marin.

Seuls cinq pays au monde, les États-Unis, le Japon, la Chine, la Russie et la France possèdent aujourd’hui un sous-marin doté de telles capacités.




Le Nautile en train d'être mis à l'eau
Mise à l’eau du Nautile depuis le navire océanographique Pourquoi pas © Ifremer

La France, deuxième plus grand pays maritime du monde

Couvrant environ les deux tiers de la surface du globe, l’océan, plus grand écosystème de la planète, reste encore largement méconnu et recèle un fort potentiel de découvertes scientifiques. L’exploration des grands fonds s’avère désormais hautement stratégique et constitue l’un des axes du plan France 2030.

Alors que ce plan met l'accent sur la robotisation (engins autonomes à grande capacité ou en essaim, véhicules téléopérés depuis la surface, réseaux câblés de mesure ou de détection), la plongée habitée profonde se démarque par sa capacité à permettre la présence humaine dans les abysses. Cette capacité nécessite un savoir-faire particulier, et la France est le seul pays de l’Union européenne à concevoir, maintenir et opérer un sous-marin habité apte à plonger à 6 000 mètres de profondeur.


Un bateau mettant à l'eau un sous-marin depuis l'arrière
Le Nautile est mis en œuvre à partir de navires océanographiques français, L’Atalante et le Pourquoi pas (ici à l’image). © Ifremer

Avancées technologiques et savoir-faire unique

Si l’accent est porté sur les robots autonomes sous-marins profonds (AUV), tels le Victor 6000 opéré par un câble depuis la surface (en cours de modernisation) et le robot autonome Ulyx dédié à la cartographie et à l’inspection des fonds marins jusqu’à 6 000 mètres de profondeur (actuellement en phase de validation opérationnelle), le Nautile possède quelques atouts. En effet, il se démarque par ses nombreux instruments et fonctionnalités scientifiques pour l’exploration. L’engin offre en particulier une perception directe de l’environnement sous-marin et navigue avec une grande souplesse.

L’arrêt du Nautile aurait ainsi signifié le non-renouvellement de compétences techniques et opérationnelles rares, ainsi que la perte de tout un savoir-faire. Il a donc été décidé de maintenir cette capacité de plongée habitée profonde jusqu’à l’horizon 2035. D’autant que d’un point de vue opérationnel, l’utilisation d’un engin habité en association avec un robot AUV permet une exploration plus efficace des grands fonds.



Le robot téléopéré Victor 6000 © O. C.-F.

Carte d’identité du Nautile

  • - Matériau : alliage de titane
  • - Autonomie (travail sur le fond) à 6000 m : 6 h
  • - Durée maximale d’une plongée : 11 h
  • - Rayon d’action : 10 km
  • - Capacité d’emport de matériel scientifique : 200 kg ou 600 litres
  • - Diamètre intérieur de la sphère : 2,10 m
  • - Trois hublots à grand champ de vision et 10 projecteurs à LED (vision directe jusqu’à 15 m de distance)
  • - Un sonar qui permet la détection d’objets ou d’obstacles sur un rayon de 300 m
  • - Deux bras manipulateurs
  • - Capteurs vidéo haute définition

L'avant du Nautile avec ses phares et cameras et bras
Gros plan sur la face avant du Nautile © O. C.-F.
Illustration d'un ordinateur de plongée
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Illustration d'un mérou brunIllustration d'un rocher