Le silure est un revenant… En effet, ce poisson d’eau douce, après avoir vécu dans nos rivières en des temps reculés, avait totalement disparu. De son nom complet silure glane (Silurus glanis), cette espèce originaire d’Europe de l’Est doit son retour en France de la main de l’homme, dans le cadre de la pisciculture et de la pêche loisir. On a commencé à le trouver(1) dans la Saône, qu’il colonise à partir des étangs de pisciculture vers la fin des années soixante, puis en Camargue, dans le bas Rhône, la Seine, la Loire (à partir de 1975) et dans la Garonne à la fin des années quatre-vingt.
À ce jour, l’animal a colonisé tout le réseau hydrographique français. Ce retour progressif a réveillé d’anciennes légendes (remontant à l’époque médiévale), et en a engendré de nouvelles sur son compte. Ainsi, le silure serait capable d’avaler tout cru un enfant, s’attaquerait à tout ce qu’il trouve, décimant toutes les autres espèces de poissons d’eau douce. Rien n’est moins faux. Tout d’abord, aucune étude ne démontre que le silure éradique toute vie aquatique locale dans les lacs et les étangs où il réside. Seule la question d’un impact négatif sur les espèces migratrices (saumons, anguilles…) est posée, une prédation qui serait avant tout opportuniste et non ciblée. Ensuite, vis-à-vis de l’homme, ce poisson adopte une attitude indolente (sauf en période de reproduction), et se laisse approcher pour peu que le plongeur arrive à le découvrir car l’animal est souvent tapi sous une souche ou des branches mortes et sa peau sombre(2) se confond avec le fond vaseux des rivières et étangs.
/// Délit de sale gueule
Cette taille plus que respectable de 2 mètres, qui fait donc de lui le plus grand poisson d’eau douce, le silure met 20 ans à l’atteindre (pour une espérance de vie allant jusqu’à 40 ans). Et de nombreux spécimens l’atteignent. La raison ? L’animal n’a pas de prédateur, autre que l’homme. D’ailleurs, le record à ce jour (2,74 m pour 130 kg, en 2017 dans le Tarn) est détenu par un individu pêché. Quant à la maturité sexuelle, elle arrive beaucoup plus tôt, autour des 5 ans. Le frai a lieu à partir du mois de juin, mais dépend surtout de la température de l’eau qui ne doit pas être au-dessus de 18 °C. Le nombre d’œufs produits dépend du poids de la femelle, de l’ordre de 20 000 œufs par kg.
Sa position tout en haut de la chaîne alimentaire et sa longue espérance de vie font que le silure concentre de nombreux polluants. Sa chair est donc impropre à la consommation. Malheureusement, des spécimens sont régulièrement tués car la capture de ce « gros » poisson représente un trophée qui attire nombre de pêcheurs sportifs, même si les plus responsables d’entre eux remettent leur prise à l’eau.