À la rencontre des seigneurs de l’océan

le 02/05/2014 publié dans le N°254 de Subaqua
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Fred Di Méglio
par Fred Di Méglio

Rendez-vous mythique dans les eaux claires du Pacifique de l’île mexicaine de Guadalupe. De cent à cent cinquante Carcharodon carcharias y font une migration saisonnière. Un lieu riche en colonies d’otaries et d’éléphants de mer et où les grands requins blancs viendraient se reproduire. Guadalupe est ainsi un site d’agrégation en fin d’été pour ces grands squales en mal de partenaire. Mâles et femelles s’y retrouvent. Cette concentration si particulière a conduit à des expéditions plongée dédiées à ces rencontres. Un reportage insolite de Frédéric Di Méglio.

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N254_Guadalupe_1Le plus grand prédateur sous-marin vivant, le voilà. Une élite de la sélection naturelle. Son seul destructeur est l’homme qui en a une peur bleue et l’a nommé en retour la mort blanche. Dans l’imaginaire collectif, il est un symbole de terreur sanguinaire. Il fascine certains mais en terrifie beaucoup d’autres. Et pourtant la meilleure connaissance des interactions avec ces squales a fait évoluer très positivement cette image totalement négative au départ.

La nature a œuvré pendant des millions d’années pour un résultat impressionnant, aérodynamisme et puissance inégalés. Sa grande taille, son museau conique, sa mâchoire surdimensionnée aux dents tranchantes et sa nageoire caudale en demi-lune aux deux lobes symétriques sont caractéristiques.

Le requin blanc n’est pas vraiment blanc, sa robe gris clair s’assombrit du ventre vers le dos. Une évolution qui date du Miocène, il y a 20 millions d’années.

 

Une solitaire du Pacifique

Guadalupe, île volcanique est située à près de 300 km à l’ouest de la côte de la péninsule de Basse Californie mexicaine. Pour l’atteindre, il faut presque 24 heures de navigation en provenance du petit port mexicain d’Ensenada après un transfert routier frontalier de San Diego (Californie USA).

Le relief volcanique tourmenté de cette île ressemble à un désert rocailleux aux parois escarpées, les chèvres introduites par l’homme ont largement participé à ce spectacle. Elle culmine jusqu’à 1 300 m au-dessus du niveau de la mer et sa barrière montagneuse stoppe les nuages du Pacifique.

L’île mesure 35 km de long pour moins de 10 km de large. Elle possède une baie protégée de la houle océanique qui est située au nord-est, c’est notre lieu de mouillage au calme après notre longue traversée avec le Nautilus Explorer. Nous voilà à pied d’œuvre.

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L’écosystème de cette île perdue a la particularité d’avoir ainsi 50 % de plantes endémiques, en raison de l’atmosphère saline qui y prédomine. Ce lieu est un refuge notoire pour les mammifères marins tels les otaries et éléphants de mer qui y forment de nombreuses colonies.

Son éloignement et sa faible accessibilité permettent une protection de cette réserve naturelle de nos jours, tant sur terre qu’en mer. Aujourd’hui, Guadalupe est classée en parc national par le Mexique depuis 2003.

C’est l’un des endroits du monde actuellement parmi les plus riches en concentration de requins blancs. Rencontres inoubliables assurées, entre juillet et décembre, avec une eau au bleu surprenant et une excellente visibilité à l’inverse d’autres spots mondiaux comme l’Afrique du Sud et l’Australie. 

Une expédition pendant quatre jours, des immersions en cages avec le Nautilus Explorer qui permettent en toute sécurité une rencontre rapprochée avec ces seigneurs de l’Océan.

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Le requin blanc est amateur d’eaux peu profondes. Une population de plus d’une centaine d’individus répertoriés depuis une dizaine d’années évolue ici, ce sont surtout les femelles qui viennent au contact.

Cette population tourne entre Hawaï et la Californie, selon la saison. Les plus belles séquences mondiales d’images faites ces dernières années sur cette espèce de requin ont été réalisées en ces lieux. Perrin et Cluzaud pour « Océans » y ont tourné des séquences mémorables sur une interaction humaine empreinte de respect mutuel.

Les conditions avec le climat d’eau tempérée, la protection environnementale et une nourriture abondante en otaries et en éléphants de mer expliquent en grande partie cette profusion en requins blancs, alors que par nature il est plutôt solitaire. Mais, il semblerait que ce soit le cycle de reproduction en relation avec les voies migratoires de cette espèce qui est le point clé de cette abondance.

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Mouillé à l’abri de la houle et du vent dominant, le Nautilus Explorer après une nuit de sommeil va immerger de très bon matin les cages à l’arrière à différents niveaux de profondeurs, deux proches de la surface, accessibles en permanence et deux autres qui par rotation successive sont descendues à 12 m et à 10 m tribord arrière et bâbord arrière.

Entre le lever du soleil et le coucher, vous pouvez arriver à passer 5 à 6 heures dans l’eau, alimentés en air depuis la surface par un narguilé, en compagnie des requins blancs pendant les quatre journées d’immersions. Ces derniers montrent une assez grande curiosité naturelle et viennent tourner autour des cages. Vous êtes à l’abri. Il est possible pour plus de piment avec l’accord du dive master de s’asseoir au sommet d’une cage, ce qui permet alors un face-à-face assez extraordinaire avec ces seigneurs de l’océan.

 

 

Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 254 Abonnez-vous

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