Les bios montent aux filets

le 01/02/2013 publié dans le N°246 de Subaqua
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Patrice Petit de Voize
par Patrice Petit de Voize

L’année 2011 avait été un test (réussi) de la possibilité de débarrasser les fonds ‑ roches, épaves ‑ de la menace terrible que font peser les filets perdus, où abandonnés, sur la faune sous-marine. Haïdar El Ali, directeur de l’Ong et du club de plongée Oceanium, à Dakar, alors opposant écologiste au gouvernement Wade, avait été l’instigateur de cette campagne. Six plongeurs de notre fédération (Subaqua n° 238- octobre 2011) y avaient participé, aux côtés de Haïdar, de plongeurs des Marines nationales française et sénégalaise et de plongeurs locaux. Par Patrice Petit de Voize. Photos de l’auteur.

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À l’issue de cette campagne, qui avait permis la collecte de près de 10 tonnes de filets abandonnés, il avait été prévu de renouveler l’opération en 2012, avec une équipe française renforcée. La période prévue : de mi-avril à mi-mai, ce qui laissait une certaine latitude de dates, les participants séjournant en principe deux semaines, trois pour les accros !

Ce qui n’était pas programmé (mais ô combien souhaité) c’est le résultat des élections présidentielles sénégalaises, la déroute de l’équipe Wade et la nomination de Haïdar El Ali au poste stratégique de ministre de l’Écologie et de la Protection de la Nature !

Du coup, notre opération prenait un tout autre relief… C’est une équipe doublée (12 Français, 1 Belge) qui débarque donc à Dakar le 23 avril en provenance de Lyon, Orly, Marseille et Bruxelles…

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Premier choc africain

Minuit passé, silhouette élancée et sourire éclatant, notre hôtesse sénégalaise, Anne-Marie, nous attend dans le tohu-bohu de l’aéroport de Yoff, et pour quelques francs CFA, la demi-tonne de bagages se retrouve rapidement sanglée sur le toit d’un car rapide.

Quiconque n’a jamais mis les pieds en Afrique de l’Ouest, ne peut imaginer le dépaysement provoqué par ce premier contact avec le ”continent noir”. Température, odeurs, bruits ; la foule des porteurs, guides, chauffeurs et intermédiaires de tout poil qui s’agglutinent autour du malheureux ”toubab” encore mal remis de 6 heures de vol via Madrid.

Le trajet (environ 20 km), entre le centre-ville, où se trouve le centre de plongée, et Yoff, est à lui tout seul la vitrine d’un Dakar perpétuellement en chantier, où les immeubles en construction succèdent aux cabanes, les quartiers résidentiels à la Médina grouillante de vie. Les néons verts des mosquées et des… pharmacies, balisent la nuit, les deux étant particulièrement nombreuses ici… soins du corps et de l’esprit !

L’arrivée à l’Océanium est le symbole d’un repos imminent. Accueil des trois bergers allemands qui viennent, joyeux, enregistrer les arrivants, distributions des chambres. Rituel immuable, auquel les vieux plongeurs Sénégaulois ne manquent pas d’initier les bleus : la première bière sénégalaise : Flag ou Gazelle (60 cl !). Dégustée bien fraîche, à 1 heure du matin, alors que les paupières commencent à tomber et que les jambes flageolent, c’est le paradis !

Après une première nuit réparatrice, le deuxième choc arrive au petit-déjeuner, servi sur la vaste terrasse qui domine la mer. Au milieu des arbres et des flamboyants, les convives ont sous les yeux une mer chatoyante… et calme, avec en toile de fond l’île de Gorée, située à un mille environ du club.

  • Quelques centaines de mètres plus haut, un majestueux bâtiment blanc sur lequel claque un immense pavillon sénégalais (rouge, jaune et vert), c’est le palais présidentiel. 

  • Quelques mètres plus bas, nos voisins, Térou Baye Sogui, minuscule village de pêcheurs, une quinzaine de pirogues, en plein cœur de la ville.

C’est tout le paradoxe de Dakar, où se cachent, au sein d’une métropole de 3 millions d’habitants, de multiples villages avec leurs ethnies, leurs coutumes et où l’on peut passer de la cacophonie citadine à la paix inattendue d’un village de pêcheurs à peine troublée deux fois par jour lors du départ et du retour de la pêche.

Le premier jour est une prise contact avec l’organisation (!) du club et ses figures emblématiques : Elimane, toujours souriant, excellent plongeur, le grand Mamadou, capitaine du bateau, imperturbable, plein d’humour et l’œil aux aguets du moindre problème… il plonge rarement avec nous car il assure la sécurité en surface, mais il est aussi à l’aise sous l’eau que dessus. N’Diaga, ” l’ancien”, est le régisseur terrestre, le bricoleur, le scribe… en gros l’homme à tout faire, jamais à court d’idées, ni de répartie. Surtout, tâche horriblement ingrate, c’est lui qui gère le frigo des Flags et Gazelles. Gare aux pénuries (dans ce cas, pour sa sécurité personnelle, il devient invisible !).

Notre bateau principal, le Mektoub, a été spécialement refait à neuf ou presque et sa mise à l’eau en grande pompe (en présence du ministre et propriétaire) est le premier acte de notre expédition.

Deuxième choc africain

Première plongée de mise en condition aux îles Madeleine, suite de pitons et d’orgues basaltiques située à une vingtaine de minutes du club. Surprise pour les bleus, la mer est assez trouble et plutôt fraîche (15 °C), les îlots volcaniques se prolongent sous l’eau par une chaussée de blocs de lave, sorte de gros pavés prismatiques, assez lisses dans la zone battue et, progressivement, concrétionnés lorsqu’on descend vers le fond de sable entre 12 et 15 mètres.

La faune est abondante et des bancs de poissons de toutes sortes environnent les plongeurs : sergents-majors, oblades, saupes, girelles paons, perroquets, chirurgiens et poissons papillons. De gros diodons, il y en a cinq espèces, déambulent tranquillement ou se cachent dans les failles et grottes avec les demoiselles bleues, les marignans et les poissons anges. Sur le sable, de nombreuses raies tigrées, ensablées ou non, se laissent approcher, voire caresser, sans montrer trop de crainte.

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Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 246 Abonnez-vous

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