Les cuivres sont lustrés, les vernis brillants, les voiles reposent soigneusement dans leurs housses respectives sur les baumes, les bouts tendus sur les poulies alignées. Le nom brille sous l’habitacle de la timonerie. Lorsque l’on monte à bord de l’Adelaar, on ressent immédiatement, le poids de la tradition des marines européennes, qu’elles soient française, anglaise, allemande, hollandaise…

En l’occurrence, ce ketch, construit en 1902, fut hollandais à l’origine, puis est devenu allemand sous un autre nom (Heimatland) pendant la guerre où il a servi comme cargo avant d’échouer dans un port de la Baltique où son actuel propriétaire, à la recherche d’une ancre, est par hasard tombé dessus en même temps qu’amoureux de sa coque, sa silhouette et sa ligne. L’Adelaar a ainsi récupéré son nom et une nouvelle jeunesse qui l’a transformé en un bateau de croisière luxueux. Aujourd’hui, l’Adelaar opère entre Bali, Komodo et Alor avec huit passagers, pas plus. Huit privilégiés, pour qui plonger « grand luxe » prend tout son sens. À raison en moyenne de trois plongées par jour et une de nuit, entrecoupées de petits-déjeuners, déjeuners, goûters et dîners copieux et succulents.

Et le tout en deux palanquées de quatre plongeurs au maximum. Ce sont ces moments-là qui donnent tout leur sel (sans jeu de mots, les embruns n’ont rien à voir ici !) à ce métier qui consiste à parcourir les mers pour en rapporter des images prises sous la surface et relater les impressions que ces plongées inspirent.
La mer à soi
La mer de Sulawesi m’était familière pour m’être rendu plusieurs fois dans la région de Manado, à Lembeh ou encore à Siladen. La mer de Banda m’avait laissé un souvenir impérissable avec ses somptueux récifs au large de Wakatobi. La mer de Bali m’avait enchanté par la diversité du spectacle offert et la mer de Florès qui baigne le parc national de Komodo, déjà, m’avait enthousiasmé et subjugué par sa richesse et la luxuriance de sa faune sous-marine. Manquait à mon carnet de voyage, Alor, toujours en mer de Florès. Cela faisait longtemps que j’avais envie de me rendre dans cette région d’Indonésie. Outre l’attrait de la nouveauté, Alor, connu pour ses villages de pêcheurs de baleines (Lamalera, Lamakera…) faisait naître en moi l’excitation de la découverte d’une autre culture.
Une croisière pour Alor démarre de Maumere sur l’île de Florès, pour une boucle au nord qui va de Florès à Alor en passant par Lembata, Pantar, Pura (toutes faisant partie des petites îles de la Sonde) pour retourner à Maumere par le sud. Seuls quelques bateaux effectuent ce trajet et pendant un laps de temps très limité pendant l’année. Ainsi, par certains aspects, les plongées relèvent quelque peu de l’exploration… Très peu fréquentés, les sites n’avaient pas été visités par nos guides depuis un an. Inutile de préciser que l’on ne s’y bouscule pas : les quelques chanceux qui y trempent leurs palmes ont la mer pour eux.

Si certains sites comme Gedong à Florès avec ses raies pastenagues et ses thons, Bangabeang slope à Pantar, petit paradis de la micro faune où les poissons fantômes le disputent aux hippocampes et aux antennaires, ou encore Shark plateau à Serbete, figurent bien dans les tablettes des guides, d’autres comme The Castle et Plateau à Kawula, constituent une première pour tout le monde.

Des premières avec leurs lots de surprises, tel ce banc de barracudas d’une densité surprenante ou ce groupe de perroquets à bosse, poisson à l’aspect toujours impressionnant.
Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 293 Abonnez-vous
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