Bateau-Stop à Nosy Be

le 25/10/2018 publié dans le N°281 de Subaqua
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Gérard Soury
par Gérard Soury

« Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse » prétendait en son temps un certain Alfred de Musset. Un bon mot qui pourrait bien s’appliquer à notre aventure malgache. Qu’importe le bateau, sa taille, son tirant d’eau ou l’âge du capitaine… Dans l’océan qui baigne l’île de Nosy Be, l’essentiel est sous la surface. Alors nous avons testé plusieurs modèles d’embarcations. Mais bon, quand en plus, le bateau est confortable et le guide parmi les meilleurs, pourquoi donc se priver ? Un reportage de Gérard Soury.

Arrachés dès l’aurore au Vanio Lodge sur la côte est de Nosy Be, nous voilà donc embarqués sur le Sésame, confortable trimaran skippé par Hervé, intarissable dès qu’il s’agit d’histoires de mer, un capitaine à l’œil malicieux, qui n’a pas pour réputation d’engendrer la mélancolie. Quelques heures de navigation plus tard, nous atteignons les Mitsio et c’est au pied de l’un des « quatre frères » que nous franchissons la surface, précédés des palmes roses de Sylvia, patronne de l’expédition. Elle sera notre poisson pilote pour l’intégralité du périple… du nord des Mitsio jusqu’au sud des Radama… à bord de quatre types d’embarcations différents. Quand on aime, on ne compte pas.

Zigzag dans les Mitsio

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Je redécouvre avec un bonheur teinté de nostalgie l’époque de mes premières incursions parmi ces îles du bout du monde : c’était le temps des bivouacs improvisés sous tentes igloo et feux de camp sur la plage de Nosy Tsarabanjina, l’envolée des grandes roussettes sur fond de soleil couchant, la découverte des falaises basaltiques de la Grande Mitsio, les plongées improvisées autour d’Ankarea…

Durant quatre jours les immersions s’enchaînent à raison de deux par jour : Les « jumeaux » avec leurs immenses bancs de vivaneaux jaune vif, le petit banc du Castor et ses incessants défilés de carangues trop furtives pour en reconnaître la marque, le banc d’Ankarea où des colonies de langoustes curieuses ont élu domicile dans le foisonnement moussu du corail noir… On pourrait imaginer pire comme première étape. D’autant qu’une visite sur la Grande Mitsio nous conduit à travers le village jusqu’au sommet de l’île où des petits bergers galopent pieds nus dans les cailloux après quelque chèvre égarée. Devant nous, l’archipel tout entier s’offre dans les ultimes lueurs mauves du soleil au déclin. Ultime récompense, les quelques langoustes négociées un peu plus tôt par le chef aux pêcheurs du village se sont invitées à la table de Sésame. Qui donc s’en plaindrait ?

Notre trop brève incursion dans l’archipel s’achève sur le Banc des 4-frères où, par 18 m de fond, nous sommes quasiment digérés par des milliers de poissons fusiliers multicolores en groupes compacts, masse protéiforme que rien ne semble pouvoir intimider, pas même nos assourdissants panaches de bulles. Point final, une superbe tortue à écailles vient nous donner un ultime spectacle avant que nous reprenions le chemin de la surface.

Les tortues de Nosy Sakatia

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S’il en était besoin, je vérifie une fois de plus que la beauté d’une plongée ne dépend en rien de sa profondeur. Devant la pointe sud de Nosy Sakatia, partie sacrée (fady) dédiée aux ancêtres, la profondeur à marée haute ne doit pas excéder 4 m. C’est pourtant là que se réunissent d’énormes tortues vertes gourmandes de phanérogames marines (plantes à fleurs) qui y poussent en abondance. Avec mon complice Didier nous nous mêlons aux brouteuses géantes plus absorbées par la tonte des jeunes pousses que par notre présence, aussi incongrue soit-elle. Des rencontres étonnantes dans un authentique studio sous-marin éclaboussé de lumière, où les actrices tiennent leur rôle sans une once de timidité.              

MAM.0584Après avoir salué comme il se doit le sympathique équipage de Sésame nous consacrons une journée à la réserve terrestre de Lokobe. Magnifique réserve ultra-protégée, riche d’animaux propres à Nosy Be, sans aucune espèce venue d’ailleurs. Inutile donc, de s’attendre à rencontrer des lémuriens venus de la côte est de Madagascar. Après avoir traversé des hectares de champs d’ylang-ylang et longé la mangrove en pirogue, la réserve dévoile ses richesses : lémuriens diurnes omniprésents, puis leurs cousins nocturnes beaucoup plus discrets, sans oublier geckos vert fluorescent, improbables caméléons et boa arboricole en pleine digestion de ses agapes nocturnes.

Deuxième vie d’un crevettier

Onze ans ont suffi à l’océan pour transformer le Mitsio, crevettier à la retraite en une superbe épave abondamment fleurie. C’est évidemment notre Sylvia à palmes roses qui nous y conduit, pilotant d’une main ferme l’Eva Be, son confortable et tout nouveau bébé poussé par un 200 CV flambant neuf qui ne demande qu’à montrer de quoi il est capable. Coulée pour la bonne cause, l’épave repose fièrement sur sa quille.

Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 281 Abonnez-vous

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