Jean-Louis Blanchard discussion à bâtons rompus

le 18/03/2021 publié dans le N°295 de Subaqua
POUR LA FIN DE L'ARTICLE 2 copie
Jean-Louis Blanchard
par Jean-Louis Blanchard

À la veille de l’assemblée générale élective pour la mandature 2021-2024, Jean-Louis Blanchard fait le point. Président jusqu’à fin mars, il revient sur les réalisations accomplies lors de ses mandats successifs, parle de l’avenir, de ses projets, ainsi que de ses souhaits pour le futur de la FFESSM.
Propos recueillis par la rédaction, images FFESSM ou collection personnelle.

Subaqua Alors, c’est certain, vous ne briguerez pas un nouveau mandat ? La décision est définitivement prise ?

1985 JLB président de la CTR en Guadeloupe copieJean-Louis Blanchard Oui, je vous le confirme : je ne serai pas candidat à ma succession. Ma décision a mis longtemps à mûrir et elle est réfléchie. Il est vrai que la fédération est ma famille depuis… Il est vrai également que je ne me sens nullement dans un « âge de la retraite fédérale ». En fait, ce qui est trompeur, c’est que j’ai occupé divers mandats fédéraux nationaux ou internationaux depuis déjà un quart de siècle, tout en ayant commencé « jeune » dans ces postes. Songez que dès l’âge de 26 ans, j’étais président de la CTR Guadeloupe. Dans un mois, vous me considérerez donc comme un jeune ancien président, pas comme un président retraité !

Subaqua Du coup, vous ne dites pas adieu à toute activité ou représentation ?

Jean-Louis Blanchard Certainement pas, car je reste en prise avec plusieurs instances nationales ou internationales. Je vais donc continuer à travailler en tant que consultant ou expert. Sans compter que mon militantisme associatif reste entier. Un exemple ? La plongée pour les personnes en situation de handicap à travers Handisub® qui me tient à cœur, d’autant que je suis à l’origine de la création politique de cette entité. Un autre exemple ? Je vais rester engagé dans le secteur de la jeunesse.

RIPE 2010 copie

Lors de mes mandats, j’ai défendu ardemment les activités des jeunes, en particulier les RIPE qui représentent à mes yeux une superbe vitrine de notre savoir-faire. Ensuite, ayant fait carrière dans l’Éducation nationale, la relation aux jeunes et aux étudiants est au centre de ma vie professionnelle.

Par ailleurs, je compte œuvrer dans le cadre des liens entre la francophonie et les sports subaquatiques, ayant développé au fil des années un véritable réseau international.

Subaqua La jeunesse est souvent associée au sport et à la compétition…

Jean-Louis Blanchard Je pense avoir été l’un des présidents qui a le plus fait pour le développement et la promotion des activités sportives que chapeaute notre Fédération. C’est sous mes mandats qu’a été nommé pour la première fois, sur ma demande, un directeur technique national issu du monde du sport-compétition, et non pas de la plongée. Une révolution culturelle qui ne s’est pas faite sans quelques résistances ! Ainsi, j’estime avoir contribué à ce que notre composante sportive compétitive, avec des règles de sélection, la constitution d’équipes de France, etc., soit mieux structurée. N’oublions pas que le sport-compétition est une clé d’entrée de la jeunesse à la fédération. Quand j’entends parfois que la FFESSM est la « Fédération de plongée » en omettant les sports subaquatiques, cela m’attriste un peu. Notre crédibilité est basée sur le cadre délégataire que nous donne le ministère des Sports tous les quatre ans, et ce sont précisément la pratique sportive et la compétition qui en font l’essence. Notre emblème c’est le sport qui, de plus, génère un axe de communication active sur les réseaux sociaux et autres médias, à l’exemple de la médiatisation de certains de nos championnes ou champions les plus performants. Ce qui n’interdit pas, j’en suis garant et ardent défenseur, que la plongée scaphandre, dont ses variantes compétitives, et merci à la PSP et à l’orientation, persiste à être identifiée dans le périmètre de délégation du ministère des Sports. Nos activités sportives représentent le point d’ancrage fondamental qui bénéficie à l’ensemble de toutes les composantes de notre fédération.

Subaqua Outre l’essor du sport-compétition, quel autre bilan de votre présidence faites-vous, notamment en termes de politique internationale ?

JLBlanchard et le ministre des sports David Douillet copieJean-Louis Blanchard La gouvernance de la fédération doit être faite de façon très politique. À cet effet, j’ai fait en sorte d’être très présent sur la scène parlementaire, aux côtés de ministres, députés et sénateurs, ainsi que des présidents d’autres fédérations et membres de gouvernements étrangers. À mes yeux, nouer de telles relations, les construire dans la durée, a été, et est, un bon moyen d’asseoir l’importance et la visibilité de notre fédération. Et c’est aussi un moyen de la protéger en cas de coup dur.

Un souci constant a toujours été pour moi de défendre l’unité que représentent chacun de nos clubs, dans leur relation locale, sociétale, fédérale, associative, éducative. Tout en embrassant le secteur professionnel, nos structures commerciales, qui participent à leur manière à l’élan fédéral.

La FFESSM est membre de la CMAS, organisation internationale en charge des Championnats d’Europe et du Monde. À cet effet, la FFESSM doit travailler en cohérence avec la CMAS et la soutenir.

Par ailleurs, mener une politique internationale participe au rayonnement de notre fédération. C’est pourquoi je me suis attaché à signer des conventions avec divers gouvernements ou fédérations étrangères, notamment francophones : Maghreb, Liban, Canada, île Maurice ou encore Djibouti. Avec, à la clé, le partage de notre savoir-faire, de nos contenus de formation, l’envoi d’instructeurs de tir sur cible, d’apnée, de nage avec palmes ou de plongée dans les pays demandeurs…

De plus, j’ai souhaité créer des passerelles d’intégration des moniteurs de pays partenaires, Allemagne, Luxembourg, Autriche, Suisse et Belgique. Ainsi, notre base de données s’est vue augmentée de ces moniteurs voisins certifiés par nous en tant que moniteurs conventionnés par la FFESSM.

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Subaqua Faisons maintenant un retour sur des moments plus personnels de cette présidence. Après 12 années passées à la tête de la fédération, quels événements et rencontres vous ont marqué ?

Jean-Louis Blanchard C’est une question piège parce qu’il y en a eu tellement que je ne peux pas tous les citer ici. Néanmoins, je dirais la satisfaction d’avoir, avec les élus, mené à bien des projets de premier plan, historiques, comme lorsque les activités de la FFESSM ont enfin été reconnues pendant mes mandats dans le catalogue des sports de l’Éducation nationale. À ce sujet, d’ailleurs, j’ai encore rencontré très récemment le ministre Jean-Michel Blanquer, dans le cadre de la signature d’un accord de continuité de nos activités au sein des collèges et lycées.

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À titre plus personnel, je retiens quelques grands moments d’émotion lorsque nos athlètes ont battu sous nos yeux des records du monde. Lors d’un record du 8.JM Bar copiemonde d’apnée, j’en ai même pleuré de joie. Je n’oublie pas non plus les rencontres de personnalités médiatiques, à l’image de Nicolas Hulot, ou celles d’artistes, comme l’acteur Jean-Marc Barr, qui n’hésitent pas à venir nous saluer sur notre stand lors du Salon de la plongée.

Subaqua Avant de conclure, parlons un peu de votre pratique de la plongée sous-marine car cette passion est quand même à l’origine de votre engagement fédéral.

9.Froid 1 copieJean-Louis Blanchard Dans le cadre de mes fonctions, j’ai eu l’opportunité de tremper mes palmes dans presque toutes les eaux du globe, notamment nationales, façades Méditerranée, Atlantique, Manche, mer du Nord, eaux intérieures, fosses et piscines. Mais aussi dans des eaux plus chaudes : Antilles, Polynésie, Nouvelle-Calédonie, Réunion, Mayotte… Pourtant, je me suis découvert, moi le Méditerranéen, un attrait fort pour les eaux froides. De Saint-Pierre-et-Miquelon au Québec, où vit mon fils aîné, il n’y a qu’un pas. Je me suis ainsi pris de passion pour la faune remarquable qu’on peut y découvrir. De fil en aiguille, je suis allé plonger en Gaspésie, à Terre-Neuve, en Norvège ou encore sur le cercle polaire en Islande.

Subaqua Quels sont vos vœux pour la FFESSM et quel message souhaitez-vous adresser à la nouvelle équipe dirigeante ?

Jean-Louis Blanchard J’espère que la Fédération va continuer à se moderniser et qu’elle tiendra compte de la mondialisation, de l’ouverture des frontières hors crise sanitaire et des évolutions réglementaires qui menacent sa situation de leader sur le plan national. Ensuite, la prochaine mandature demande du courage, en grande partie à cause de cette crise Covid qui dure et qui touche de plein fouet le mouvement sportif, dont notre fédération. Ses conséquences se font ressentir à tous les niveaux : ralentissement de nos activités à travers la fermeture des piscines et l’arrêt de championnats, y compris le championnat de France, baisse de fréquentation des clubs, etc. Ce qui mécaniquement entraîne une baisse de notre chiffre d’affaires. On dit que nous allons vers une nouvelle année « blanche », je trouve plus approprié d’employer le terme d’année « noire » !

Face à un tel contexte, je reste plus que jamais au service de la FFESSM. Mes trois mandats présidentiels m’ont permis de développer réseau, carnet d’adresses et expertise sur tel ou tel dossier. Alors, si la prochaine équipe dirigeante souhaite me solliciter, je répondrai bien entendu présent. Mais cela, c’est une autre histoire qui appartient à ceux qui vont diriger la Fédération et à qui je souhaite d’écrire des pages avec la même ambition que celle qui a été la mienne pendant toutes ces dernières années. Une fédération sportive, solidement ancrée nationalement et présente à l’international, respectable et respectée.

Un parcours en devenir…

Au moment où mon mandat de président de la FFESSM va cesser à la fin du mois de mars 2021, j’ai eu l’envie de partager mon parcours avec vous. C’est une vie, un projet. Et, comme tous les projets, tous les chemins, ceux-ci ne sont jamais terminés. Ce qui me permet de rassurer mes amis de la fédération quant au futur proche. Car le sens du voyage, c’est justement le voyage lui-même. Il va continuer. Donc, pas du tout testamentaires, voici les jalons à ce jour de mes titres ou fonctions.

avec René Cavallo le 31 mars 2007 copieFormé à la dure de la plongée dès les années estudiantines par une grande personnalité de la fédération, René Cavallo, qui est mon ami pour toujours, je passai ensuite le deuxième échelon de plongée (l’ancien nom du niveau 4 GP) dans les années quatre-vingt 2010 JLB et Tonton Claude Arzillier copieau CIP Bendor avec de célèbres et redoutés instructeurs tels Claude « Tonton » Arzillier et Charles Nett, puis je devins moniteur auxiliaire (l’ancien nom du MF1) de plongée, puis moniteur fédéral (l’ancien nom du MF2) à 24 ans.

Je partais alors m’installer en Guadeloupe. J’en suis resté antillais de cœur et de déraison toute ma vie, non sans avoir été, pendant un mandat de 4 ans, président de la commission technique régionale de Guadeloupe dès l’âge de 26 ans. Période d’intenses activités où j’accédai à l’instructorat fédéral national (IN n° 91) à 32 ans.

Mais déjà, la bivalence entre diplômes fédéraux et brevets d’État me taraudait ; je devins BEES 2 plongée subaquatique en 1987, diplôme d’autant plus utile que je m’octroyais une période professionnelle dans ma vie de moniteur, ayant décidé de mettre entre parenthèses quelque temps mes activités de jeune prof de maths.

Il faut croire que le goût du corpus fédéral m’étreignit très vite, puisque j’accédais à divers dossiers nationaux. Feu le président Francis Imbert, avec lequel je partageais un accent méridional irrésistible et une passion sans compromis pour la fédé, m’amena ainsi aux affaires techniques (la CTN) et aux affaires internationales (mon premier mandat à la CMAS date de 1997. J’y étais, excusez-moi du titre pompeux, « président de la commission internationale de l’enseignement de la plongée »). J’accédais aussi, dans le cadre du ministère des Sports, aux joies de la réglementation. Ce fut là une bonne façon de se frotter aux réalités et à la complexité des sports subaquatiques, notamment avec le plateau des organismes qui y participent, dont certains syndicats, d’autres fédérations, voire quelques célèbres agences internationales de plongée. Il fallait composer, il fallait être crédible, il fallait y être un peu « guerrier ». Je fus l’un des artisans du fameux « arrêté du 22 juin 1998 » qui perdura jusqu’en 2011. De même que, en 2011, je travaillai au sein de la direction des Sports à l’élaboration du Code du sport (CdS) partie plongée. La petite histoire retiendra peut-être que l’annexe 3-14-b (les puristes s’y reconnaîtront…) fut largement exigée par moi. Elle « sauvait » pour quelques années la codification explicite des niveaux de plongée, en parallèle du système des aptitudes tel qu’adopté dans le CdS.

Entre-temps j’obtenais en 1998 le diplôme réputé suprême, à savoir le BEES3 (brevet d’éducateur sportif du 3e degré en plongée subaquatique). Cela étoffa mon rôle d’expert auprès du ministère des Sports, mais aussi dans d’autres instances (par exemple l’INSEP à Paris où je siège régulièrement dans les jurys de BEES3, ou dans les meetings ISO/CEN en tant qu’expert mandaté par l’AFNOR).

Président de notre commission technique nationale de 2001 à 2009, je fus en même temps, pendant 7 ans, vice-président de la fédération. Élu président de la fédération en 2009, j’ai accompli avec conviction 3 mandats de présidence nationale. Sur le plan international, je présidai CMAS-Europe pendant 4 ans et je suis actuellement vice-président de notre confédération CMAS. En tant que président national je suis également administrateur de l’UCPA et du CREPS de Provence-Alpes-Côte-d’Azur.

D’autre part, j’ai été nommé au CPSPH (Conseil permanent de la sécurité de la plongée humaine, Marine nationale) et je suis officier dans la réserve citoyenne, au grade de lieutenant-colonel.

5. 2005 de la politique f‚d‚rale au jazz il n'y a qu'un pas copie

Et enfin, parce que tout finit en chansons, parce que le spectacle continue, mes proches savent que, hormis mon poste de « matheux » à l’université, je fus dans mon jeune temps un intermittent du spectacle. Voilà pourquoi, lors de certaines mémorables AG de la fédé ou pendant certains Salons de la plongée, d’aucuns me voient au piano, ou, au synthé ou au micro partager quelques moments de saine musique.

Jean-Louis Blanchard

Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 295 Abonnez-vous

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