Alban Michon, NOMADE DES GLACES ET témoin d’une nature en pleine évolution

le 28/06/2019 publié dans le N°285 de Subaqua
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Olivier Clot-Faybesse
par Olivier Clot-Faybesse

Passionné par les régions polaires, Alban Michon a bouclé en 2018 une expédition hors du commun, une de plus. À l’occasion de la sortie d’un livre en retraçant le récit, « L’itinéraire d’un nomade des glaces », cet aventurier du froid revient sur ses motivations, les péripéties vécues, et témoigne de ce qu’il constate depuis ses premières incursions dans l’Arctique.
Deux mois (62 jours exactement) à arpenter à skis la banquise arctique, tout en tirant deux traîneaux remplis du matériel nécessaire à une telle aventure. Une marche de 500 km réalisée, bien sûr, en plein cœur de l’hiver et surtout en solitaire. Un périple pendant lequel Alban Michon aura pris le soin de briser la glace, non pas avec une Inuit croisée aux alentours de sa tente… mais au sens propre. C’est-à-dire au piolet afin de piquer une tête dans l’eau. Histoire de découvrir en solo l’autre face de la banquise… S’il y a un peu plus d’un an, à l’aube de partir pour cette nouvelle aventure, notre homme se confiait dans ces pages(1), notamment sur sa philosophie et ses buts, la sortie de son dernier livre permet par le texte et l’image de se replonger dans cet univers de glace qu’il affectionne et de souligner les menaces qui pèsent sur l’avenir d’un monde en voie de fragilisation. Propos recueillis par Olivier Clot-Faybesse. Images : Andy Parant (andyparant.com)

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COUV LivreISubaqua Dans ton précédent entretien, tu soulignais qu’un des ressorts de tes expéditions touchait au problème du changement climatique et au besoin de sensibiliser sur son impact dans le monde de la glace. Cela est plus que jamais le cas ?

Alban Michon Tout à fait. En 2010, lors de ma précédente aventure au Pôle Nord géographique, l’expédition s’était révélée des plus extrêmes avec un accès à cet endroit unique très difficile. Or, quelques années plus tard à peine, en 2015, je tombe sur un documentaire édifiant. Il relate l’histoire d’un brise-glace nucléaire russe qui emmène des centaines de passagers chinois précisément au même endroit où j’étais en 2010. On les voit descendre sur la banquise pour faire un barbecue géant… Ainsi, en cinq ans à peine, nous sommes passés d’une aventure à un voyage. Tout va dorénavant, vite, très vite. Autre exemple, le mythique passage du Nord-Ouest (dans le grand Nord canadien arctique) est en train de devenir une route maritime reliant les océans Atlantique et Pacifique. Un nouvel eldorado maritime qui permet aux bateaux de commerce d’économiser environ 5 000 km sur leurs trajets habituels. Il ne faut pas oublier que la banquise arctique est à la base du climat. Si la glace fond, cela va précipiter un déséquilibre général. Ce changement historique, nous le vivons en ce moment. Il est par conséquent vital d’expliquer et d’informer tout en s’adaptant au monde de demain. C’est pourquoi je souhaite, par le biais de mes aventures, toucher le grand public à ma manière. C’est-à-dire le sensibiliser tout en le faisant rêver. Mon souhait, c’est de montrer que le changement climatique prend réellement forme mais que rien n’est perdu et que la nature reste encore belle.

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Subaqua Ironiquement, la météo n’a pas été lors de cette expédition en mode « je me fais un sympathique barbecue sur la banquise » ?

Alban Michon (sourire) Effectivement, j’ai été gâté. Plusieurs jours durant, le mauvais temps, le vent glacial en face de moi et le jour blanc permanent m’ont fait perdre mes repères. Les températures très basses, jusqu’à – 55 °C, ont gelé la cornée de mes yeux me rendant partiellement aveugle pendant quelques jours. Et puis j’avais compté sur le fait que la banquise commencerait à se fracturer, ce qui m’aurait permis de me glisser facilement à l’eau. À la place, j’ai eu du très solide et compact, soit deux mètres d’épaisseur de glace. Avec à la clé plus de sept heures à creuser un trou pour pouvoir m’immerger. Alors oui, j’ai vécu des journées éprouvantes physiquement et mentalement.

Ceci est un extrait du Dossier paru dans le numéro 285 Abonnez-vous

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